Quoi de neuf ?

Entretien avec Marisa Cavalli

November 16, 2020 Les cafés du CREFO Season 1 Episode 9
Quoi de neuf ?
Entretien avec Marisa Cavalli
Show Notes Transcript

Dans cet épisode, Emmanuelle Le Pichon, directrice du CREFO, rencontre Marisa Cavalli, experte indépendante dans le domaine de l'éducation.

Joey [00:00:01] Dans cet épisode, Emmanuelle Le Pichon, directrice du CREFO, rencontre Marisa Cavalli, experte indépendante dans le domaine de l'éducation. 

Marisa [00:00:07] Certains enfants, qui sont ainsi coupés de leur langue toute première, peuvent développer des manques affectifs très forts. 

Joey [00:00:19] Bienvenue à Quoi de neuf!

Emmanuelle [00:00:35] Bonjour, j'ai le grand honneur de recevoir aujourd'hui la professeure Marisa Cavalli. Bonjour Marisa! 

Marisa [00:00:41] Bonjour Emmanuelle! Merci de cette invitation. 

Emmanuelle [00:00:45] Marisa, ça fait des années que je lis et que je travaille sur vos travaux et j'ai devant moi un gros volume que je vous montre intitulé Langues, bilinguisme et représentations sociales au Val d'Aoste. Donc, je sais que votre coeur va à l'enseignement bilingue et plurilingue en particulier et surtout à la formation des enseignants dans des contextes nationaux et internationaux. Mais lorsqu'on cherche votre biographie sur Internet Marisa, on trouve enseignante et chercheuse. Alors est-ce que vous voulez nous parler un peu de ça? 

Marisa [00:01:22] Oui, très, très volontiers. Alors, je vous raconterai ma carrière en vous disant tout d'abord qu'il y a une partie de ma carrière qui me tient beaucoup au cœur. Je sais que quand il y a des chercheurs et des chercheures, parfois, on aime à cacher cette partie. Et bien j'ai été 17 ans dans les classes du français langue seconde au Val d'Aoste et je remercie, je pense quotidiennement le ciel de m'avoir permis de vivre cette expérience là parce que toute réflexion par la suite, avait un visage d'enfant, une moue de doute, une moue de bonheur face à la connaissance qui se construisait. Donc j'avais des visages devant moi quand je réfléchissais aux questions de langue. Après, je suis passée dans un institut de recherche éducative. L'Institut régional de recherche éducative du Val d'Aoste, qui était une institution intermédiaire entre le terrain, les écoles, les enseignants et les universités. On s'occupait donc de recherches éducatives mais également de formation, de documentation. Et là, ça a été plutôt construire avec les enseignants. Et ça a été une époque pleine de bonheur où, évidemment, on a fait aussi comme institution des erreurs, c'est-à-dire où nous avons cultivé l'excellence et nous avons formé des enseignants extraordinaires qui sont maintenant tous à la retraite maintenant, et qui emportent cette montagne de savoirs qu'on a construite avec eux dans les classes. Et l'erreur qu'on a faite c'est que tout le monde ne peut pas s'engager à fond dans la recherche éducative. Et parfois, il faut essayer de satisfaire aussi des exigences moins hautes, moins élevées chez les enseignants, de façon à ce qu'ils tiennent le pas, qu'ils puissent innover, mais sans peut-être s'engager à fond comme la recherche action, par exemple, peut le demander. 

Emmanuelle [00:03:45] Est-ce que c'est cette activité qui vous a amenée au Conseil de l'Europe? 

Marisa [00:03:48] Oui, absolument. C'est dans le cadre de cette activité que j'ai commencé à mettre le nez dans les activités du Conseil de l'Europe et j'ai surtout participé en tant qu'experte à un projet extraordinaire qui s'appelle Langue de l'éducation, langue pour l'éducation qui a amené à forger...comment dire...à une opposition presque avec la Commission européenne qui a le dicton L langue maternelle plus deux. Le Conseil de l'Europe, c'était plutôt et éducation plurilingue et interculturelle, qui est un concept global qui englobe toutes les langues des répertoires des enfants, les langues présentes et enseignées à l'école, la dimension langagière des disciplines donc voilà et j'ai gardé... 

Emmanuelle [00:04:47] Donc finalement un concept déhiérarchisant on pourrait dire par rapport aux langues?

Marisa [00:04:52] Ou je disais, reliant peut-être, c'est-à-dire créant des passerelles entre toutes les langues dans une optique vraiment d'interdisciplinarité qui peut être très, très diversifiée. C'est un peu mon dada, l'interdisciplinarité, c'est-à-dire je crois beaucoup aux disciplines parce que j'entends parfois des discours de gens qui voudraient une déconstruction totale des disciplines. Les disciplines, c'est quand même une construction historique de nos cultures. Et elles ont, comment dire, droit de cité. J'adore les disciplines scolaires, mais je n'aime pas les voir comme des constructions fermées...des lieux clos. Il faut absolument que entre toutes les disciplines et surtout, et surtout à propos des langues de la dimension langagière, il y ait une...comment dire, des passerelles continues. Je pense que actuellement, dans l'école, on ne peut pas se passer de prendre en considération les langues que les enfants, je pense aux migrants, mais en Italie, il faut penser également aux dialectophones ou aux gens qui parlent des langues minoritaires. Comment utiliser ces compétences déjà là pour asseoir et construire une, deux, trois langues dans l'éducation qui puissent être par la suite utilisées également à travers les disciplines. Donc je vois une communication continuelle entre... 

Emmanuelle [00:06:39] Communication continuelle entre les langues et entre les matières. Je trouve que c'est une très belle, très belle introduction. Merci Marisa. Marisa, je voudrais savoir quelles sont les langues qui vous habitent. Alors excusez-moi de considérer les langues comme des entités individuelles, vous venez de parler de passerelles. 

Marisa [00:06:54] Alors vous avez montré ce bouquin qui me tient vraiment fortement, fortement à coeur, fortement à coeur...

Emmanuelle [00:07:03] Oui, Langues, bilinguisme et représentations sociales au val d'Aoste. 

Marisa [00:07:06] Parce que quand j'ai travaillé, j'ai surtout travaillé sur les textes écrits. C'était l'écrit depuis, depuis l'école, depuis le lycée. Et c'était la première fois où je m'approchais de si près de l'expression personnelle orale des gens. Et j'ai trouvé le voyage absolument, très, très intéressant. La complexité de l'oral d'un côté et d'un autre côté, le fait que cet oral là me donnait accès justement à la pensée des gens, mais une pensée qui n'était pas désincarnée, mais qui était justement fortement incarnée. Alors, cette recherche là m'a fait comprendre que ma langue à moi, c'est un peu comme la langue, je pense de l'arabophone de Jacqueline Billiez qui disait « Ma langue à moi, c'est l'arabe, mais je ne le parle pas ». La langue à moi que je ne parle pas, que je parle avec un accent, ma mère me dit « Tu ressembles à une étrangère », c'est le francoprovençal, c'est-à-dire c'est la langue du terroir ici, que mes parents parlaient dans deux variétés différentes puisque sur Val d'Aoste, chaque village a son francoprovençal. Donc c'est une langue où l'interdit social que les miens avaient mis, pour bien apprendre l'italien il faut que vous ne parliez pas le francoprovençal, fait que j'ai une excellente compétence de compréhension. Mais dès que j'essaie de m'exprimer, les mots ne viennent pas, les tournures, ce sont celles du français ou celles de l'italien. C'est un mélange horrible, ce qui fait que les miens me reconnaissent comme étrangère, voilà. 

Emmanuelle [00:08:58] Mais non les mélanges c'est beau, n'est ce pas? Les mélanges c'est beau. On se bat pour les mélanges. 

Marisa [00:09:04] Mais ce qui m'étonne toujours, il faudrait que là ce soit un psychologue qui m'explique pourquoi. Parce que c'est une langue que j'ai toujours entendue. Pourquoi est-ce que j'arrive pas à reproduire dans cette langue-là le lexique que j'ai, que je comprends. C'est-à-dire il y a une espèce de tabou qui s'exerce sur cette langue-là. De toute façon, ça donc c'est une langue qui que j'ai entendue dès le berceau, mais qui m'a été interdite. Je ne pouvais pas la parler. 

Emmanuelle [00:09:39] Quelle violence, n'est-ce pas? 

Marisa [00:09:43] Dalgalian, Gilbert Dalgalian me disait autrefois que certains enfants qui sont ainsi coupés de leur langue toute première peuvent développer des manques affectifs très forts, puisque leurs parents se privent quand même de la langue dans laquelle ils expriment de façon la plus complète, la plus nuancée et la plus fine leurs sentiments, voilà. 

 

Emmanuelle [00:10:07] J'y crois très fort. Moi, j'ai ressenti des sentiments extrêmement violents quand un jour une institutrice m'a demandé de ne plus parler français avec ma fille. C'est quelque chose de très, très fort et je n'ai aucun doute par rapport à ça. Merci de l'énoncer. Vous venez d'un village du nord de l'Italie et je me souviens que lors d'une intervention avec vous, certaines questions des auditeurs ou je me souviens plus remarques, commentaires des reviewers, je me souviens plus exactement, étaient très intéressantes parce qu'elles montraient combien les gens ont du mal et même les spécialistes, les experts ont du mal à imaginer que le français puisse être une langue minorisée, en particulier dans une région frontalière de la France. En ce sens, je me disais qu'on pourrait presque faire un parallèle avec l'Ontario où on a la même chose. Les gens n'arrivent pas à imaginer que le français n'est pas une langue majoritaire, mais une langue minorisée à la frontière avec le Québec. Est-ce que c'est difficile ce type de perception quand on se bat pour les droits de l'éducation en français au Val d'Aoste? 

Marisa [00:11:08] Oui, absolument. Même dans un tout petit milieu comme le Val d'Aoste. Parce que le Val d'Aoste est une vallée géographique. On a 120 000 habitants environ. C'est vraiment comme un petit pâté d'une très, très grande ville. On est tout petit et pourtant, il y a une très forte richesse de langues. Une fois, j'ai essayé de provoquer mes concitoyens en écrivant un article dont le titre était « C'est vrai, les Valdôtains ne sont pas bilingues ». Et tout le monde était très étonné parce que dans une institution comme la mienne, où on se battait pour le bilinguisme et moi, j'ai continué disant oui, c'est vrai, ils sont multilingues, ils sont plurilingues. On a un territoire qui est multilingue et les Valdôtains sont plurilingues. Plurilingues, pourquoi? Parce que...si on regarde les langues du terroir, je vous ai dit il y a le francoprovençal qui nous a amené déjà en 1561 le français comme langue officielle, administrative et puis langue de l'Église et puis langue de l'école, et qui a vécu avec ce francoprovençal pendant des années, des années. Mais nous...des siècles. Et nous avons, dans une forme de diglossie quotidienne. Mais nous avons également une petite colonie alémanique dans deux petits villages, vraiment perdus je pense un millier d'habitants, de locuteurs de walser, deux variétés le titsch et le teutsch, ce qui a amené, en 93, l'enseignement de l'allemand comme langue à l'école. Donc vous voyez déjà on a deux parallélismes mais encore, il faudrait mieux creuser cette question. Il y a eu beaucoup d'immigration. Vous savez que le Val d'Aoste, pendant l'époque fasciste, a subi la politique linguistique fasciste qui était carrément monolingue, qui voulait, qui ne voulait pas d'une langue minoritaire. Le francoprovençal a réussi à se faufiler dans la vie quotidienne sans sans trop être enquiquiné, et le français a été persécuté. L'enseignement a été défendu. Il y a eu un projet ridicule qui a été celui de l'italianisation de tous les noms, par exemple, mon village s'appelle Courmayeur. C'est très beau comme nom. Ça vient du latin couria maior et on l'appelait Cormaior. On avait un village qui s'appelait Pré-Saint-Didier et on l'a appelé San Desiderio Terme. Donc vous voyez la violence qui s'est exercée à l'époque. Il y avait également un projet d'italianisation des noms de famille. Mon seul nom, celui que je porte, est un nom italien Cavalli. Mais j'ai une grand-mère qui s'appelait Lumignons, une autre qui s'appelait Berteau et une autre encore qui s'appelait Pélissier. Donc vous voyez, il y a une francophonie ambiante qui était très, très, très, très forte, qui est inscrit dans le temps.

Emmanuelle [00:14:44] Donc c'est intéressant parce qu'en fait, lorsque nous discutions toutes 2 juste avant ce podcast, vous parliez du Val d'Aoste comme d'un lieu de rencontre. Et vous en parliez au niveau de...en disant qu'en fait la réflexion des chercheurs sur le Val d'Aoste et sur ces rencontres de langues, de gens ou de personnes, et même sur l'historique de cette vallée, avait permis de mettre à jour des concepts qu'on n'aurait même pas imaginés si on ne s'était pas penché sur cette petite, mais si importante région. 

Marisa [00:15:23] Oui, je pense que les chercheurs étaient et restent toujours très fascinés par, comment dire, la dimension laboratoire, parce que ici, au Val d'Aoste, le bilinguisme scolaire n'est pas une question de petites élites fortunées. C'est une école qui est le fruit d'un choix politique très éclairé et très conscient. Ne pas créer dans la population des fractures artificielles, mais essayer de donner à tout le monde cette langue en partage. Je vous parlais des langues du Val d'Aoste mais les langues du Val d'Aoste, maintenant, c'est des dialectes importés par l'immigration sous Mussolini. Mais l'immigration de l'après guerre encore et l'immigration actuelle et dont nous avons eu différentes vagues d'immigration et différentes vagues d'intégration puisque par exemple, quand nous avions les gens du Sud qui arrivaient ici, il fallait les intégrer parce qu'on les sentait comme des personnes étrangères. Et pourtant, cette intégration s'est faite à tel point que certains enfants, fils de migrants italiens, ont le -r que vous entendez chez moi qui n'est pas le -r français, qui n'est pas non plus le -r italien, mais qui nous vient vraiment de notre francoprovençal. C'est le -r du francoprovençal. 

Emmanuelle [00:16:58] Il ressemble à un certain -r romain. Est-ce que je me trompe? À Rome parfois on entend un -r comme ça.

Marisa [00:17:06] Ah alors, alors là, il faut faire attention. Parce que ça, c'est plutôt comment dire. On appelle ça ... c'est le -r de la noblesse. Non, et c'est plutôt disons d'une certaine classe sociale ou alors, c'est carrément un problème de prononciation. Problème de prononciation. Mais disons que nos immigrés portent parfois des prénoms du style Joël, Thibeault, etc. Disons que notre milieu est un milieu qui intègre facilement mais le français. 

Emmanuelle [00:17:48] C'est un milieu, c'est un milieu divers. Est-ce que c'est finalement, vous vivez finalement, c'est intéressant parce que quand on pense au Val d'Aoste, on pense effectivement au francoprovençal, au français, à l'italien. Mais on pense pas forcément à ce lieu comme un lieu de diversité. Mais ce que vous venez de décrire, c'est une très grande complexité qui va bien au delà de cette langue. 

Marisa [00:18:15] Exactement. Et je crois que ce n'est pas la caractéristique du seul Val d'Aoste. Je crois que souvent, si on regarde de près chaque situation sociale, on va repérer qu'il y a des registres différents et que dans la pluralité, la diversité se joue même à l'intérieur d'une seule langue. Parce que les enfants qui proviennent de milieux, je ne veux pas parler de milieux défavorisés parce que milieux populaires peuvent ne pas être défavorisés. Je viens d'un milieu populaire, non, mais il peut ne pas rencontrer dans sa vie quotidienne ce type de culture scripturale qui prépare à l'école, qui est celle de l'école. 

Emmanuelle [00:19:05] Oui, finalement, on va à l'école pour apprendre à lire et écrire. On peut dire ce qu'on veut, mais c'est à ça que ça revient. 

Marisa [00:19:11] Ou tout au moins, même à l'oral, apprendre cette variété de langues qui est plus standard, qui est plus châtié, etc. Qui est plus fourbue, qui est plus... 

Emmanuelle [00:19:24] Pour revenir un peu à cette question de diversité, à la fois dans votre vie et en même temps au cœur de la vallée, je me demandais si c'était la raison pour laquelle vous avez été amenée à travailler sur cette notion de médiation, en particulier avec quelqu'un qui, je crois, a beaucoup marqué votre parcours qui est le professeur Daniel Coste, mais qu'on connaît très, très peu hors de l'Europe. Est-ce que vous pouvez nous expliquer ce que c'est en quelques mots et dans quelle mesure est-ce que votre travail a évolué et à quoi il correspond pour pour l'enseignement des langues, mais l'enseignement tout court. L'éducation au cœur de cette diversité. 

Marisa [00:20:01] En réalité la réflexion a été...a commencé en parallèle à la réflexion sur les nouveaux descripteurs pour le CECR. Il nous semblait important d'essayer de voir en quoi une réflexion sur un cadre qui avait été élaboré au début des années 90 s'insérait dans un milieu social sociétal complètement changé et qu'est-ce que cela pouvait comporter. Et les traits qui nous semblaient caractériser la situation sociale actuelle comme différente par rapport à celle du début de la réflexion, c'est qu'il y avait une plus forte mobilité dans la société, mobilité due aux migrations internationales qui sont en train de s'intensifier de partout, mais mobilités aussi au sens de changement de place dans la société, changement de classe aussi, c'est-à-dire...et les phénomènes qui sont par contre des immobilités. Par exemple, les plafonds de verre, etc. L'idée, c'était que il fallait quand même, par rapport au cadre, essayer de ne pas parler, de mettre en position frontale individu et société. On se disait que, en réalité, l'individu appartient à une multitude de groupes, que ce soit l'église, que ce soit la famille et les amis, le club de sport, le réseau social, etc. Des tas de communautés, de groupes, de communautés de pratique et que donc il fallait plutôt raisonner en termes de justement...la mobilité se fait à l'intérieur en réalité de groupes, pas dans une société indéfinie et en entrant dans ces divers groupes, la personne qui a un projet de vie, n'importe lequel, rencontre, rencontre la diversité, l'altérité, rencontre l'altérité des autres et rencontre à l'intérieur des communautés des normes qui sont différentes, des codes différents qu'il faut qu'il apprenne. Et on se dit que tout cela quand il s'agit d'interventions sociales, ça ne peut qu'être facilité que par la médiation.  

Emmanuelle [00:22:55] C'est le cas de l'enfant qui passe de la maison à l'école, qui rencontre d'énormes différences de type de vocabulaire, de pragmatisme etc. 

Marisa [00:23:02] Exactement. Le modèle qu'on a construit est un modèle qui devrait vraiment pouvoir expliquer l'action sociale dans vraiment les plus divers milieux: l'école, l'école, par exemple. A l'école, il y a divers médiateurs. Il peut y avoir le chef d'établissement entre les parents et l'école, entre les parents et les professeurs et l'enseignant, l'enseignant qui fait de la médiation entre sa discipline et la langue, et l'enfant qui est là, devant lui, sur la langue qu'il utilise dans cette discipline ou dans la relation de cet enfant à cette discipline là. Cette médiation porte aussi bien, non pas tellement l'idée de conflit. Il peut y avoir conflit, même dans une discipline. Un enfant qui dit je ne comprends rien aux mathématiques. Bon le médiateur qu'est l'enseignant doit essayer de résoudre ce conflit qui est souvent qui peut être relationnel, dans le sens qu'il y a vraiment quelque chose qui est une friction entre entre l'enfant et cette discipline ou cognitif, parce que la discipline n'a pas été encore assez décortiquée pour qu'elle puisse devenir gérable et assimilable par l'enfant. 

Emmanuelle [00:24:31] Ouais, sauf qu'on sait que, en particulier au cœur du plurilinguisme, il y a l'insécurité linguistique et que pour un enfant de dire maître ou maîtresse, j'y comprends rien c'est extrêmement, extrêmement rare. Et quand l'enfant le fait, on est très heureux qu'il le fasse. Je pense que l'éveil des enseignants à la médiation, c'est justement ça de les éveiller à cette insécurité linguistique n'est-ce pas? 

Marisa [00:25:04] Absolument. Et pour ce qui est du linguistique, la réflexion porte non seulement sur l'acquisition qui est très importante pour moi d'une langue, mais ça porte aussi sur cette dimension transversale des langues. Et on se rend compte que la médiation sur la discipline peut prendre une orientation qui est celle de passer de l'abstrait au très concret. C'est-à-dire l'enseignant reformule certains concepts de la discipline de façon à faire en sorte que l'enfant le rapproche de son expérience propre et de son langage propre. Donc c'est un...disons une reformulation vers le bas, mais dès qu'on en est arrivé là, il faut amener l'élève à remonter l'échelle de l'abstraction et passer dans le langage qui est son langage quotidien, arriver à exprimer les concepts dans la langue de la discipline. Et c'est justement tout le travail de formulation, reformulation dans une langue et dans une autre, parce que au Val d'Aoste nous avons exploré cela cognitivement, le passage d'une langue à une autre est quelque chose d'absolument extraordinaire pour justement essayer de défamiliariser des concepts que l'enfant croit avoir, mais qui sont des mots creux qui ne contiennent pas le concept, soit donner une vision différente du concept, non? Disons que il y a toute cette reformulation du...de l'abstrait vers le concret, du concret vers vers l'abstrait, le chemin, le chemin inverse et quand il y a deux langues, ce jeu se multiplie. 

Emmanuelle [00:27:12] C'est intéressant parce que j'ai vu beaucoup ça avec les enfants plurilingues qui ont tendance à....ils ont...je formulerais de cette manière une certaine....ils sont habitués à ne pas comprendre d'emblée un certain nombre de choses et donc ils devinent. Ils ont une certaine tolérance vis-à-vis de l'incompréhension. Donc, très souvent, s'il y a des concepts qu'ils comprennent pas tout à fait, qui restent très abstraits, comme vous le disiez, ils vont essayer de deviner par le concept, par le contexte, par ce qu'il y a autour, etc. sans forcément arriver à cette phase dont vous parlez très bien, qui est la phase de reformulation de manière à donner une définition précise du concept qu'ils croient avoir compris. Je trouve ça très intéressant parce que ça va bien au-delà de ce dont on a parlé pendant des années, qui était l'alternance codique et peut-être même au-delà de ce nouveau concept qui fait rage à l'heure actuelle, qu'on appelle Translanguaging. Vous vous êtes un peu opposée à ça. 

Marisa [00:28:17] Il faut que je reconnaisse que le terme qui nous vient d'outre-Atlantique a mis le concept à la mode et que bon, ça rend peut-être politiquement acceptable ce que nous didactiquement nous pratiquons et nous recherchons depuis des décennies, des décennies. Ce que je reproche un peu au concept de translanguaging, c'est qu'il reste au niveau du politique, il me semble t-il, du comment dire, de l'affectif et de l'intégration, mais qu'il n'a pas intégré tout le travail, tout le chemin dur et pénible, mais pleine de satisfactions que nous avons fait en observant dans les classes ce que alterner les langues veut dire par rapport à une discipline ou à une autre. Nous avons conduit une recherche et sur les compétences de lecture dans les disciplines et on a alterné les tâches en français et en italien sur le développement actuel de l'enfant. Donc pas... développement proximal. Et qu'est-ce qu'on a remarqué que les enfants qui sont moyens comme ça, qui ont des problèmes dans le concret, réussissent bien mieux leurs tâches en langue 2 car la langue 2 introduit une certaine distance. On est pas si familier que ça avec cette langue. 2. Et donc, que fait l'enfant? Simplement, il analyse plus attentivement la consigne, il essaie de mieux la comprendre parce qu'il ne se sent pas en territoire sûr. Et donc nous avons fait des tas de découvertes comme ça avec les enseignants dans les classes. Et chaque petite découverte était un trésor.

Emmanuelle [00:30:18] Donc en fait, qu'est-ce que vous êtes en train de dire? Vous êtes en train de dire que d'autoriser un passage vers la langue maternelle permet de renforcer les compétences en langue 2 ou vous êtes en train de dire mais non en fait, il faut travailler en langue 2 parce que c'est la langue dans laquelle l'enfant va avoir la performance optimale. 

Marisa [00:30:33] Alors là au Val d'Aoste nous avons adopté après alors le principe monolingue, un espace, une langue, une journée, une langue, un prof, une langue, une matière, une langue. C'est plutôt l'idée que il y a des espaces, des moments, des classes, des cours, des parties du curriculum qui peuvent être faites, qui doivent être faites dans une langue, d'autres dans l'autre langue, étant entendu que là, ce que nous appelions la micro alternance, c'est-à-dire le recours dès qu'on en a besoin à n'importe quel code, pourvu qu'on se fasse comprendre, est toujours admissible et c'est même, comme disait Jean-François de Pietro, Marinette Matthey et toute cette équipe-là, des séquences potentiellement acquisitionnelles. C'est-à-dire dès qu'il y a un passage d'une langue à l'autre, il y a quelque chose d'intéressant qui se passe, surtout si on est centré sur quelque chose d'intéressant. 

Emmanuelle [00:31:34] Sauf que l'enfant ne le fera pas s'il n'y est pas encouragé. Un enfant ne change pas de langue s'il sait que l'école est le temple d'une autre langue. Il ne le fera pas. C'est simple.

Marisa [00:31:47] Exactement, il faut changer, comme le dit humblement notre livre, les représentations des enseignants et les pratiques. Moi, j'ai vu des enseignants qui ont changé et qui ont dit à leurs élèves, maintenant vous faites un résumé de cette activité que nous avons faites en français. L'élève lève la main. La question en quelle langue est-ce que je parle? Tu choisis? Les enfants n'étaient pas trop habitués à ce choix de langues. Eh bien, on a remarqué que ils choisissaient selon leur cœur. Il y en avait beaucoup qui choisissaient la langue française et pas la langue, la langue qui semblait la langue de facilité, l'italien. Je crois que il faut avoir en tant qu'enseignant par rapport aux langues, une attitude qui est une attitude vraiment de très grande ouverture. Mais sachant qu'il faut qu'il y ait quand même, c'est pour ça que l'idée de...une planification et que à un certain moment l'élève doit distinguer les deux langues. Il ne doit pas être dans le mélange perpétuel. Il faut s'appuyer sur le mélange pour arriver à l'acquisition, mais il y a des moments où tu peux parler pluri, mais d'autres moments, où il faut que tu parles mono dans l'une et dans l'autre langue. 

Emmanuelle [00:33:10] On revient à cette idée. On revient à cette idée de contrat didactique, n'est-ce pas? 

Marisa [00:33:15] Oui, absolument, c'est central. C'est-à-dire dire aux enfants, parce que c'est vrai que la langue 2 n'a pas d'espace en dehors de la classe qui soit assez fort pour, comment dire, nourrir cette langue-là. Donc il faut que l'enseignant reste le plus longtemps dans la langue. Mais il ne faut pas, comment dire, évacuer la langue première des enfants. Et il faut vraiment se dire il y a des moments où on peut alterner tranquillement entre les deux langues. Tu parles la langue que tu as envie de parler. 

Emmanuelle [00:33:51] Ce qui me semble, c'est qu'il faut d'abord pour y arriver rejeter les catégorisations arbitraires du bilinguisme, est-ce que je me trompe? C'est-à-dire de dire celui là, il est anglophone et ou bien il est allophone et donc il va entrer tel système parce qu'il est faible, etc. Vous, vous plaidez plutôt pour un enseignement commun à tout le monde, mais différencié, je me trompe? 

Marisa [00:34:16] Absolument, non. Je suis tout à fait d'accord avec cela c'est-à-dire bon, nous n'avons pas cette idée de vraiment éloigner des classes à degrés. Même les enfants handicapés sont insérés en Italie depuis très, très longtemps, depuis des décennies dans les classes dont la diversité fait partie de l'humanité, il faut travailler tous ensemble. Mais j'ai entendu un jour un Canadien qui disait les catégories type langue étrangère, langue seconde, langue première sont fausses. Il faudrait s'en passer. Chez nous, en Italie et au Val d'Aoste, je trouve que ce serait très dangereux de faire cela parce que alors imaginez un enfant qui entre juste arrivé du Maroc dans une classe valdôtaine. C'est clair que l'italien et le français seront des langues étrangères pour lui et que donc il faudra tout faire pour lui apprendre la langue d'une certaine façon. Imaginez que ce soit un élève, par contre, qui est là depuis pas mal d'années et qu'il entend l'italien, qu'il apprend le français. Lui il est plutôt dans une situation de langue seconde, c'est-à-dire il peut s'appuyer sur le contexte. Il est assez grand déjà pour pouvoir apprendre également du contexte. Et puis si c'est une langue maternelle, c'est autre chose. Donc moi, je trouve que ces catégories là, il faut bien avoir à l'esprit quand on est face à un enfant, qu'est-ce que l'Italien est pour cet enfant? Qu'est-ce que le français est? Et alors là, je vous dirais que vous aurez un enfant qui parle le francoprovençal donc le dialectophone, qui devrait avoir une large voie ouverte vers le français. Mais si on prend la peine d'ouvrir la porte du francoprovençal à l'école, ce qui n'a pas été fait dans le passé, et et cela est vrai pour n'importe quelle langue, il faut rendre les élèves fiers des langues de leur répertoire. 

Emmanuelle [00:36:40] Marisa, vous avez parlé de beaucoup de personnes avec qui vous avez travaillé. Vous avez...voilà vous êtes quelqu'un qui rassemble, n'est ce pas? Je me demandais est-ce qu'il y avait des personnes qui vous avaient marquée plus que d'autres dans votre vie ou dans votre parcours scientifique? 

Marisa [00:36:57] Alors je dirais deux personnes que j'ai bien connues et toutes les deux que j'ai connu d'abord par leurs textes et une personne dont j'ai lu les livres et qui ont changé complètement...là c'est mon chat...qui ont changé complètement, complètement, vraiment, ma vision de l'éducation bilingue. Alors, donc le tout premier, c'est naturellement Daniel Coste. Je dois vous dire que en tant qu'enseignante, j'étais moyennement sûre de moi pour une éducation bilingue dans les disciplines. Il y avait Laborit, Daniel Coste avec Auguste Pasquier, une petite brochure pour les enseignants du primaire où il introduisait l'intérêt...où il argumentait l'intérêt de l'alternance des langues dans l'apprentissage disciplinaire en le couplant à l'alternance des, comment dire, des types de textes. Alors imaginez que, par exemple, on commençait par une expérience personnelle d'un rat, d'une petite souris et puis, il y aurait la petite fable, puis il y aurait un petit texte avec illustrations, etc. Et il montrait comment cette alternance textuelle pouvait se faire en deux langues et l'apport cognitif que cela pouvait avoir. Et pour moi, ça a été véritablement une illumination. C'est le texte qui a changé ma résistance personnelle par rapport aux disciplines. Tout le monde n'a pas la chance de rencontrer des textes, des textes comme ça. Et donc j'ai dit à Daniel Coste venez tout de suite et on a travaillé avec lui parce que nous, nous étions plutôt sur la pédagogie intégrée des langues, des trois langues l'italien, le français et l'anglais. Et lui, il nous a dit « Écoutez, là, il faut que vous vous y mettiez rapidement parce que la réforme va venir ». Et on s'y est mis. Bernard Py, Bernard Py c'est quelqu'un d'absolument extraordinaire. Vous voyez, le voisinage des frontières avec la Suisse a fait que Bernard Py a été appelé au moment où il commençait à travailler sur les immigrés hispaniques à Neuchâtel. Donc il avait commencé toute cette réflexion qui a abouti avec le texte de Lüdi-Py Être bilingue. Il y avait cette analyse de l'alternance codique telle qu'elle se fait dans, chez les bilingues non scolaires dans la vie quotidienne. Il était ami de Grosjean donc c'est quelqu'un qui a beaucoup coopéré avec nous et qui nous a amenés à cette vision non équilingue du bilinguisme. Et comme il était ami de Grosjean, j'ai commencé à lire. Nous avons commencé à nous approcher des textes de Grosjean que je conseille à tout le monde. Je commencerais avec le texte de 1982 Life with Two Languages. Enfin un scientifique qui est bilingue et qui ne préfère pas des normes intenables pour les bilingues. Du coup, par exemple, je suis devenue beaucoup moins puriste. Je ne cherche pas à cacher mes langues. Sans doute, les auditeurs entendront mon italien. Sans doute, ils entendront certaines rocailleusités de mon francoprovençal là-dedans. Quand je parle italien, personne n'arrive à comprendre d'où je viens. Je suis un être bizarre...

Emmanuelle [00:40:57] Je crois que c'est la caractéristique de tous les plurilingues, Marisa. On ne sait plus d'où ils viennent et d'ailleurs ils ne viennent que de là où ils veulent venir. Merci beaucoup. Dans cette émission, on aime la diversité et on la célèbre. Je voulais vous demander si nous devions lire un ou deux de vos articles pour comprendre mieux votre travail. Lesquels vous ne conseilleriez? 

Marisa [00:41:22] Alors, difficile parce que moi je vous conseillerais le gros bouquin de 700 pages. Ha! Ha! Ha! Ha ha ha ha ha ha ha! Mais pas tellement pour ce que j'ai écrit avec les autres, mais pour la pensée et l'expression des Valdôtains par rapport aux langues qui sont parlées ici. Le corpus de cette recherche est vraiment extraordinaire. Et cette recherche a été une aventure extraordinaire avec des scientifiques qui sont devenus des amis et avec les Valdôtains avec qui nous avons interagi. Et justement, je peux vous conseiller un article qui a paru dans la revue du GEPE à Strasbourg: Politiques linguistiques et représentations sociales. Récit de recherche. J'ai dit toute ma déception par rapport à ce qu'on n'a pas fait de cette recherche. L'écoute qu'elle n'a pas eue chez nous au Val d'Aoste. Le fait que ces réflexions précieuses de tant de gens et l'essai de, comment dire, de mise en évidence que nous avions tenté, n'ait pas eu écho un écho auprès des politiques qui s'intéressent à l'éducation. On a parlé monolinguisme, bilinguisme, représentation monolingue. Elles sont tellement difficiles à éradiquer. Moi, je voudrais vous conseiller aussi un autre texte auquel je tiens beaucoup parce que je montre comment malheureusement, dans les dernières adaptations des programmes nationaux, les adaptations nous permettent de adapter les programmes nationaux à notre politique bi plurilingue au Val d'Aoste. On a loupé le coche de faire une synthèse de tout ce que de merveilleux chaque degré scolaire avait fait dans les années précédentes. On a reconstruit à nouveau un autre modèle, qui est, à mon avis, est un peu paradoxal. J'ai intitulé cet article Du bi ou pluri un repassant par le mono, parce que je vois réapparaître des notions monolingues du style justement une personne, une langue, une journée, une langue, une autre journée, une autre comme s'il était possible véritablement de travailler à la pluralité en séparant en étant mono. Voilà.

Emmanuelle [00:43:52] Merci Marisa. Une dernière question juste pour la route. Qu'est-ce qui vous fait rêver? 

Marisa [00:44:00] Alors l'éducation...l'éducation, sans doute. Je voudrais dire à tous les enseignants que nous sommes sur un métier qui permet d'envisager le futur. Nous travaillons sur les futurs citoyens du monde et que, par notre travail, nous avons la possibilité de changer. Mais pour changer, il faut justement passer à un enseignement qui prenne en compte le lieu d'où les enfants viennent. Si on veut que l'éducation soit égalitaire, qu'il soit de qualité pour tout le monde, faut pas imaginer que les élèves arrivent tous d'une classe sociale qui permet de construire une certaine façon de concevoir l'école, l'écrit, l'oral, etc. Il faut savoir que il y a des enfants qui sont privés, qui sont privés de cela. Alors j'ai vu une image qui représente bien pour moi l'éducation. Alors on voit un terrain de foot au loin. Il y a une barrière, il y a des enfants, il y a un enfant qui est un peu plus grand alors on lui met une seule caisse. Le deuxième enfant est un peu plus petit on lui met deux caisses et le troisième enfant est plus petit encore eh bien on lui en met 3. Alors vraiment, essayez à l'école de donner toutes les chances à tous les élèves, surtout à ceux qui sont le plus loin de la culture scolaire. Je crois que ça, c'est le grand rêve. Je n'y ai pas réussi en tant qu'enseignante. Je suis sortie avec plein de questions, plein de doutes et j'y travaille encore. Et puis peut-être...

Emmanuelle [00:45:48] En tout cas vos travaux sont un vrai tremplin pour y arriver et je conseille vivement à nos auditeurs d'aller les consulter. Une grande partie de vos travaux sont en ligne, accessibles, en particulier tous les travaux du Conseil de l'Europe, accessibles gratuitement. Merci beaucoup, beaucoup Marisa. Je ne vais pas vous demander si vous aimez le café parce que j'en suis certaine. Je me réjouis déjà du moment où nous allons pouvoir le partager ensemble en présence dès que cette terrible pandémie sera terminée. Merci beaucoup Marisa. 

Marisa [00:46:26] Merci à vous. Merci de cette invitation qui m'a fait beaucoup, beaucoup de plaisir et bonne chance à tous les enseignants s'il y en a qui nous écoutent. L'année va être dur, de nouveau pour vous tous. Bonne chance, bonne chance et soyez conscient de l'énorme importance que vous revêtez dans la société. 

Emmanuelle [00:46:48] Merci, merci beaucoup. Et puis, au Canada, on dit au plaisir!

Joey [00:46:54] Saviez-vous que vous pouvez compléter une maîtrise en éducation à temps partiel à l'Université de Toronto entièrement en français? Pour avoir plus de détails, contactez-nous par courriel à crefo.oise@utoronto.ca.