Quoi de neuf ?

Entretien avec Luisa Martín Rojo

January 06, 2021 Les cafés du CREFO Season 2 Episode 1
Quoi de neuf ?
Entretien avec Luisa Martín Rojo
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Dans cet épisode, Monica Heller, membre du CREFO, rencontre Luisa Martín Rojo, professeure à l'Universidad Autónoma de Madrid.  

Joey [00:00:01] Dans cet épisode, Monica Heller, membre du CREFO rencontre Luisa Martín Rojo, professeure à Universidad Autónoma de Madrid. 

Luisa [00:00:08] Je pense qu'on doit récupérer cette idée de la langue de la communication comme un partage...et pas comme un capital. 

Joey [00:00:18] Bienvenue à Quoi de neuf! 

Monica [00:00:35] J'ai le plaisir aujourd'hui de parler avec Luisa Martín Rojo. Elle est catedrática, c'est-à-dire plus ou moins professeure titulaire de sociolinguistique au Département de Lingüistica General à l'Universidad Autónoma de Madrid. Elle s'intéresse au discours comme espace de lutte sociale pour l'équité et elle a mené du travail de terrain dans plusieurs espaces clés, de la prison à l'école, au terrain du mouvement Occupy et jusqu'aux communautés zapatistes, surtout en Espagne, mais aussi au Mexique, aux États-Unis et en Angleterre. Elle est la fondatrice et a été la première présidente du groupe EDiSo Asociación de Estudios sobre Discurso y Sociedad. C'est une association intellectuelle qui se gère comme communauté, collectivité et qui crée des espaces, des colloques, des blogs, des sites d'échange pour une discussion plurilingue, surtout en espagnol, portugais, galicien et catalan au sujet des aspects langagiers et discursifs de la justice sociale. Elle organise un nouveau centre interdisciplinaire de recherche, le MIRCo, qui se penche sur des questions de multilinguisme, de discours, de communication et d'identité sociale. Elle est responsable ou co-responsable, entre autres, des livres suivants Voces del aula:  etnografias de la  escuela multilingüe, Constructing Inequality in Multilingual Classrooms, A sociolinguistics of diaspora: Latino practices, identities, and ideologies, Occupy: the spatial dynamics of discourse in global protest movements. Et tout récemment, l'ouvrage collectif Language and Neoliberal Governmentality. Et surtout le CREFO a eu l'honneur de l'accueillir deux fois comme professeure invitée en 2003 et en 2009. Alors, Luisa, aujourd'hui j'aimerais surtout discuter avec toi de certaines idées clés qui sont ressorties de tes activités comme fil rouge dans ta pensée, dans ton travail. Commençons avec l'idée de capitalisation et décapitalisation ressortie, si je me souviens bien, des recherches de ton groupe dans six écoles de la région de Madrid qui accueillaient, si c'est les mots pour le dire, des élèves issus de l'immigration. Pourrais-tu nous raconter ce que votre équipe a observé et comment ça a donné lieu à cette idée? 

Luisa [00:02:59] D'abord, bon après midi et merci pour m'avoir. C'est parce que je trouve que ces sortes de conversations sont très utiles et surtout pour faire...pour donner des cohérences à notre travail. Et c'était surtout quand on a fait cette étude dans les écoles multilingues, mais aussi quand on a fait une comparaison entre les programmes de bienvenue et les programmes d'anglais. On a beaucoup de...maintenant dans plusieurs écoles à Madrid et aussi secondary schools, primary and secondary, primaire et secondaire et qu'on a des écoles qui est...il y a un programme de language and integrated learning in English and Spanish, espagnol et anglais. 

Monica [00:03:59] C'est ce qu'on appelle le CLIL, c'est ça? 

Luisa [00:04:02] C'est le CLIL et ils font au moins trois ou quatre sujets en anglais. Et toujours, les mathématiques et la langue, ils les font en espagnol, une chose comme ça. Mais il y a beaucoup d'écoles, ça peut être 500 écoles comme ça. Donc, quand on vu que dans ces écoles ils utilisaient le CLIL, mais qu'il y a les écoles de bienvenue où les étudiants apprennent l'espagnol avec des méthodologies anciennes et aussi sans matériel, parce qu'il n'y a pas de matériel pour l'enseignement de la langue espagnole académique pour l'école, pour les immigrés, c'est ça que j'ai commencé à penser qu'il y avait un problème de distribution des ressources linguistiques parce qu'on ne peut pas dire que on connait pas les meilleures procédures ou la méthode si on l'applique dans un cas et pas dans l'autre. Et dans un cas les professeurs étaient bilingues et dans les cas des langues d'espagnol les professeurs, c'était pas un spécialiste dans l'apprentissage des langues. Donc je pensais...il y a quelque chose qui ne va pas ici et donc on a commencé à étudier ce qui s'est passé à la salle de classe. Et à la salle de classe on avait aussi ce différent management des ressources linguistiques parce que dans les cours de, par exemple, en biologie ils utilisaient l'espagnol comme un point de référence. Si quelqu'un savait pas dire en anglais un terme très scientifique, comment, pour la matière une chose comme ça, il pouvait utiliser l'espagnol, ça va, mais dans les cours de langue espagnole pour les immigrés, il y avait une norme et une règle qui était seulement en espagnol. Il y avait par exemple une fille chinoise qui après deux ou trois semaines, elle a compris qu'on parlait de la loi de la gravité et ils savaient pas parce qu'ils n'avaient aucun point pour accrocher ce qui se passait à la classe. Donc et ils ne pouvaient pas utiliser une machine pour la traduire, une chose comme ça. Donc je dis bon, il y a management inégal des ressources. Et aussi, quand les étudiants étrangers ils voulaient...par exemple, il y avait trois filles, c'était trois soeurs qui parlaient différentes langues arabes, le standard, le darija et une langue berbère, un peu de français et l'espagnol. Elles aimaient faire des jeux de mots avec tout ça et elles proposaient, surtout la plus âgée, elles proposaient des dessins pour la professeure, pour faire des petits... comme c'était comme un exercice de langue, c'était très bien pour apprendre. La professeure disait non en espagnol. C'est là que je dis ici, il y a pas seulement un management inégal des ressources, il y a des ressources qui sont valables et d'autres qui ne sont pas valables. Mais aussi, il y a une dynamique des distributions qui capitalise à les étudiants qui apprend l'anglais, l'espagnol et décapitalise les enfants et les étudiants qui essaient d'apprendre de l'Espagne. 

Monica [00:08:25] Donc, quand tu dis par exemple capitalisation, ce que tu veux dire, c'est que, par exemple, les élèves de la majorité, si on peut le dire, on reconnaît leur capital en espagnol, c'est légitime et peuvent l'utiliser pour acquérir encore d'autres capitaux linguistiques importants, c'est-à-dire l'anglais, tandis que les élèves issus de l'immigration, ils arrivent avec toutes sortes de capital berbère, différentes formes d'arabe mais ça c'est dévalorisé, c'est évacué de l'école, ils sont décapitalisés et ça empêche leur accès à la ressource linguistique de l'espagnol pour ne pas parler même de l'anglais. C'est ça? 

Luisa [00:09:11] Ça fait plus difficile d'acquérir d'autre capital. Et je pense que c'est un peu différent si on compare avec d'autre travail à l'école que je vis l'échange des étudiants qui s'opposaient à cette règle de seulement en espagnol et ils disaient, est-ce qu'il ne peut pas venir, un ami que j'ai qui est bilingue en arabe et m'expliquer des concepts de la physique en arabe et comme ça, je pourrai apprendre en espagnol. Donc, il s'opposait à la règle, ou bien il essayait de faire sa langue aussi en capital. Ou bien il essayait d'apprendre l'espagnol, mais avec l'aide de sa langue ou bien de l'anglais aussi. Par exemple les étudiants chinois, ils utilisaient l'anglais comme une façon de traduire l'espagnol. 

Monica [00:10:22] Donc, les élèves avaient des stratégies pour contourner la règle ou pour contourner la situation dans laquelle ils et elles se trouvaient. Mais ça donnait quoi ces stratégies-là? 

Luisa [00:10:37] Au moins, on voit que tout ce processus n'est pas statique, est très dynamique et dynamique et situationnel et c'est pas une distribution abstraite, c'est vraiment la pratique dans l'interaction. Et ça, il y a ces dynamiques, il y a des capitalisations, décapitalisations et les gens ont cet échange. Donc je trouve que ça c'est très simple...

Monica [00:11:12] Cette capacité d'action...Et quand ton équipe, vous avez parlé de vos résultats, vous avez publié des livres. Comment ça a été reçu? 

Luisa [00:11:25] Bon. Il y a différents niveaux. On a eu et on a trouvé qu'il y a...on a capturé l'intérêt de la mairie de Madrid un peu, de la mairie des villes qui étaient proches de la ville. Mais pas par exemple comme dans la région, on a la région est indépendante en relation avec l'éducation parce que l'État espagnol n'entrait pas dans la régulation de l'éducation dans les régions. Pas tout à fait.  Donc, à la région, on n'a pas eu aucune répercussion. Ils sont même pas restés parce qu'on a essayé d'avoir des réunions et ils ont refusé. Mais dans les écoles, c'était différent, c'était différent. 

Monica [00:12:33] C'était comment? 

Luisa [00:12:34] Différent. Parfois, ça a été très intéressant parce qu'on a développé des liens, on a fait des workshops, des choses comme ça et ça a marché. Mais ce n'est pas simple parce que parfois ils disaient que notre façon de voir les choses c'était un peu, c'était trop critique. 

Monica [00:13:01] Est-ce que il y a eu des échos avec par exemple, je ne sais pas les associations des immigrés? 

Luisa [00:13:07] On a fait quelques cours de sensibilisation, mais après tout ça et la crise de 2008-2009 est arrivée et tous les programmes qu'on avait pour les immigrés ont disparu. Et aussi, il y a eu 3-4 ans que les immigrés qui sont arrivés en Espagne, les numéros ont redescendu. Donc dans ces moments, ça a été un peu...on a laissé ça tomber si tu veux. 

Monica [00:13:48] Et donc et pour passer à d'autres choses. J'ai l'impression que en tant que chercheure, en tant qu'enseignante universitaire, tu nous raconteras un petit peu la suite, mais tu as eu un intérêt marqué pour la question de l'engagement, justement, autant dans les sujets de tes recherches, mais aussi dans ta propre pratique de chercheure et d'enseignante. Donc tu t'es intéressée, par exemple, au mouvement Occupy, au mouvement zapatiste, t'as aussi été comme enseignante. Ces pratiques, par exemple, dans l'espace d'Ediso que tu as fondé. Est-ce que tu pourrais nous parler un petit peu de...peut-être de ce lien-là, tu dis que vous avez laissé tomber un petit peu du côté des écoles, mais pour embarquer ailleurs, non? 

Luisa [00:14:40] Oui, parce que c'était...bon on a vu dans cette recherche, à l'école, on a vu des choses que je trouve que ce sont très importants. Là cette idée du sujet qui a une capacité d'action, des transformations et l'autre c'était que nous nous sommes demandés qu'est-ce qui se passe avec quand les gens internalisent cette idée négative dès qu'ils parlaient mal, ils parlaient pas bien. Donc après ça, on essaye depuis ça de développer et comprendre mieux ces questions. Donc, la question des sujets, elle est comment cette internalisation peut pousser les gens vers les consents. 

Monica [00:15:38] L'accord. 

Luisa [00:15:40] L'accord et l'adaptation, l'accord tout ça. On a pensé qu'on pouvait travailler à ces points pour voir si on pouvait explorer d'autres façons de réagir, peut-être la résistance, pas les consents. Donc moi, là, j'ai commencé à travailler avec mes étudiants à l'université. Et c'est là qu'on a trouvé la question du néolibéralisme et comment le néolibéralisme a changé la perception qu'ils avaient et même la relation qu'ils avaient avec les langues. 

Monica [00:16:25] Pourrais-tu peut-être juste expliquer donc ces relations en dedans de l'Université néolibérale, tu le décrirais comment? 

Luisa [00:16:33] Parce que bon, on a fait dans...toutes les années, on fait ça, on partage des petites anecdotes qui parlent et des situations linguistiques, ou bien où ils se sont trouvés discriminés, pas confortables ou maltraités. Et avec ça, je commençais à trouver qu'il y avait un numéro assez grand des étudiants qui parlaient des langues comme capital et qu'ils avaient une idée très compétitive et sa relation avec les langues c'était presque économique, mais un peu plus qu'économique, parce que ce n'était pas seulement l'idée de on va apprendre parce que je vais avoir mon curriculum ou une chose comme ça. C'était surtout une idée de je peux me transformer pour être plus entrepreneur, pour être plus compétitif. Donc, l'idée avec les langues plus qu'un instrument de communication, la langue qu'on voit plutôt comme un ressource pour le succès.

Monica [00:18:01] Et ça, c'était nouveau dans ton expérience. 

Luisa [00:18:03] Peut-être pas tout à fait nouveau. Non, je ne crois pas que c'est nouveau mais c'est plus un...de la vie, de la carrière, même du corps et de la santé. C'était plus général dans sa vision un peu néolibérale que nous pouvons nous transformer pour être plus compétitif. 

Monica [00:18:36] Et le corps et la santé dans ça?

Luisa [00:18:38] Et c'est également on fait de l'exercice pour être plus rentable. On apprend des langues pour être plus rentables. Est-ce qu'on peut dire ça? 

Monica [00:18:48] Oui, oui tout à fait, oui, oui. 

Luisa [00:18:50] Donc...c'est comme les self-help literature, une chose que l'on peut se transformer pour avoir un succès.

Monica [00:19:07] Donc c'est notre responsabilité de prendre notre vie en main et d'aller de l'avant pour faire ce qu'il faut pour avoir une valeur dans la société. 

Luisa [00:19:19] Et surtout dans les marchés. C'est ça que j'appelle les self-made speakers. J'ai trouvé que les gens apprennent tout seuls des langues et avec les vidéos, avec Netflix, avec la musique, avec tout ça. 

Monica [00:19:42] Et donc, pourquoi venir à l'université pour apprendre les langues?

Luisa [00:19:45] Non, ils viennent pas pour ça. Bon il y a des gens qui viennent pour ça, mais pas pour apprendre une langue, mais pour apprendre deux, trois ou quatre. Et mais aussi, surtout, c'était des étudiants qui étudient son degree. Ce qu'il faut c'est tout en anglais, par exemple, les relations internationales... 

Monica [00:20:14] OK donc ils sont dans des programmes d'études où la langue de l'enseignement c'est l'anglais. Et donc, pour le reste, si je me dis bon, c'est important d'apprendre le mandarin, ça je m'en occupe, je fais ça en dehors de l'université. 

Luisa [00:20:28] Parfois oui, et même son anglais, c'est toujours en construction. C'est ça qu'ils parlent...Je dois améliorer, je dois passer l'examen...c'est toutes les idées du néolibéralisme, d'avoir une certification, de faire des examens, d'avoir l'accréditation. 

Monica [00:20:48] Oui, oui d'avoir les diplômes...la preuve, quoi. Et donc, c'est quoi le lien dans ton travail, dans ta pensée entre ça et ton intérêt, par exemple, pour le mouvement Occupy ou les efforts énormes que tu as investis pour créer des espaces qui sont justement pas compétitifs du tout, mais qui seront collaboratifs, qui sont collectifs. 

Luisa [00:21:15] C'est là que j'ai vu que c'était très intéressant de recruter les étudiants pour la recherche pour montrer aussi comment ils pouvaient utiliser la recherche pour comprendre mieux la société et même là, le mouvement Occupy ça a été pour moi une surprise parce qu'on avait commencé à faire un Linguistic Landscape de Madrid pour comprendre la distribution des langues dans la ville. Et là, un jour, le Occupy mouvement était dans la place et on l'a trouvé. Et moi et les étudiants on faisait tout ça ensemble ce Linguistic Landscape. Donc, on est passé à la place. On était là. Et moi, j'ai dit ici, il y a quelque chose que j'avais vu jamais. Et c'était comme la langue pouvait transformer l'espace et faire une place qui était un lieu de rencontre, mais aussi politique parce que les gouvernements de la ville est là, aussi Apple avait là son grand magasin. Et bon, c'était un endroit où les gens viennent et passent et tout ça. Et un jour, ça devient un espace politique. Et même une utopie avec les affiches, avec tout ça. Ils savaient compartimenter la place en différents espaces pour une bibliothèque, pour un espace de discussion, pour l'assembly... 

Monica [00:23:14] Les assemblées, oui. 

Luisa [00:23:15] Les assemblées, les groupes de travail. Et dans tout ça, même il y avait un espace pour les enfants. Ils n'avaient pas d'argent du tout. Il y avait un endroit pour manger, mais pas d'argent. Les gens venaient avec...et donc j'ai compris que c'était les affiches qui transformaient l'espace même les... C'est comme à Paris, moi j'étais à la Nuit debout. Après ça, j'ai essayé d'étudier tous les Occupy. Et à la Nuit debout, la place de la République est devenue la place des communes, de la commune. C'est une sorte de resemitization qui transforme l'espace en un espace de rébellion, au moins un espace qui nous montre une autre réalité possible. Et là, c'est les étudiants qui étaient avec moi, on a fait tout ça ensemble. Et après ça, on a fait beaucoup de Linguistic Landscape avec beaucoup de gens, 300 ou 400 avec les...d'EDiSo. Et on a vu que c'était quand les gens cherchèrent...qui font la recherche, l'enquête, ça prend beaucoup et en plus, on voit les choses.... 

Monica [00:24:52] Autrement. 

Luisa [00:24:53] Oui, parce que son expertise est intégrée à la recherche. Et la façon de voir la langue est intégrée à la recherche. Je crois que là, on a ouvert un espace sociolinguistique un peu nouveau. 

Monica [00:25:14] Et quand tu essaies, par exemple, de construire ce genre d'espace autrement, je ne vais pas dire utopique parce que je ne pense pas qu'on soit là, mais très concrètement, par exemple avec EDiSo ou avec MIRCO, avec ton groupe de recherche, qu'est-ce que tu dirais? Mettons que je disais écoute, je veux faire comme toi, comment je fais, qu'est-ce qui est facile, qu'est-ce qu'il est difficile? Quels sont les obstacles? Qu'est ce que tu me raconterais?

Luisa [00:25:48] Et je crois qu'il y a une idée à la base que c'est important, que c'est l'idée qui est...On habite dans un monde où tout est bien commodifié. Donc, comment on peut s'opposer à la commodification de tout et l'idée qui c'était...de Polanyi a dit ça, c'était depuis qu'il y a une commodification, la réaction peut être mettre les choses en commun. Donc, moi, je pense que dans l'espace académique, on a cette pression de faire des rankings, des publications avec l'index de l'impact et toujours avec cette...on n'a pas de temps, même pour lire. Il faut écrire, mais on ne peut pas lire. C'est complètement stupide. Et donc si on met tout ça en commun, les ressources qu'on a, on gagne tous. Et à EDiSo, je vis ça très clairement. À EDiSo, il y avait des gens qui étaient complètement isolés dans la géographie d'Espagne, Portugal et même l'Amérique latine parce qu'ils travaillaient en sociolinguistique au Critical Discourse Analysis et ils étaient complètement seuls dans ces universités et maintenant ils sont en réseau pour demander qu'est-ce qu'il faut lire pour ça ou qu'est-ce que...Il y a eu assez nombreux des groupes de recherche...on a l'origine à EDiSo et aussi une façon que les jeunes préfèrent se présenter dans un espace de ces groupes d'idées, de coopération. Donc je trouve que ça a été une très bonne expérience, même difficile. 

Monica [00:28:06] Donc, en fait, ce que tu es en train de nous dire que ce qui est en commun, les communes, c'est quelque chose qui s'écrit finalement par le biais de l'interaction. Et que c'est en fait fondamentalement sociolinguistique, la création des espaces discursifs autrement quoi. 

Luisa [00:28:24] Mais aussi il faut changer la logique parce que si tu penses que...bon peut-être tu y gagnes avec ça, mais c'est plutôt l'idée de la coopération. Et de devenir une collectivité qui est sincèrement elle est plus forte et personne n'est isolé et il y a toujours quelqu'un qui peut y contribuer. Mais ça dans l'autre côté, il faut avoir une logique de coopération. 

Monica [00:29:03] Et des moyens de gestion de conflits?

Luisa [00:29:07] Aussi, aussi. Parce que par exemple, la langue, ça a été une question difficile parce que comment trouver une façon de faire ça, sans évoquer les qualités linguistiques, les langues de la colonne, ou de la métropolis ou les langues dominatrices. Donc comment faire un espace de qualité linguistique? On a essayé ça avec le multilinguisme. Mais aussi il faut apprendre à comprendre d'autres langues pour avoir un dialogue polyglotte. Donc, oui on a eu des questions comme ça et aussi c'est pas facile d'écrire par exemple un texte et ne pas mettre ton nom. 

Monica [00:30:14] Oui, d'accord, oui, oui. Et les gens acceptent ça ou pas forcément?

Luisa [00:30:20] Oui, ça marche. Mais il faut un certain degré de réflexivité et pas tout le monde a les mêmes degrés de réflexivité. 

Monica [00:30:32] Il y a des conséquences aussi très différentes pour quelqu'un comme toi ou comme moi où on a des postes et des jeunes qui doivent s'établir dans leur carrière.

Luisa [00:30:41] C'est pour ça, à EDiSo, on a fait toujours...on avait l'idée pour toutes les activités, il fallait mélanger les seniors and juniors parce que comme ça, les juniors avaient aussi un...quelqu'un qui...et aussi une aide pour mettre en circulation tout ce qu'ils faisaient parce que le problème ici, c'est toujours au travail, mais on ne peut pas mettre en circulation c'est un fait. Parce qu'il n'y a pas un dialogue équitatif, une participation équitative surtout si on travaille en Espagne, un peu dans la périphérie. 

Monica [00:31:27] Donc écoute, merci infiniment. Je pense que pour moi, t'es vraiment une inspiration de comment on fait pour avoir une cohérence entre sa vie de chercheure, d'enseignante et juste citoyenne d'une société qui sait comment ouvrir les espaces, pas juste subir les contraintes qu'on nous impose en ce moment historique, c'est vraiment un point de vue super super important. J'invite ceux et celles qui écoutent, qui sont francophones à visiter EDiSo et faire l'effort justement d'une compréhension des langues qui sont quand même des langues romanes et qui ne sont pas si difficiles à lire pour quelqu'un qui parle français et donc de découvrir justement ce monde intellectuel terriblement créatif, avec des idées vraiment intéressantes, des débats vraiment intéressants. C'est un des rares en fait dans mon expérience, où je pense que les gens font vraiment le pari de la collaboration. C'est important à voir c'est important, je pense pour tout le monde de voir et d'essayer de notre côté de créer ce genre d'espace. Luisa est-ce qu'il y a d'autres, des derniers mots que tu aimerais rajouter avant qu'on termine.

Luisa [00:32:53] Je pense qu'on doit penser un peu à ce que c'est la langue et la communication comme un instrument, non pas un instrument, mais comme un communiant, une façon d'être et un contact puis surtout maintenant, en ce moment si difficile. Et je pense qu'on doit récupérer cette idée de la langue et de la communication comme un partage, une action de partager et pas comme un capital, toujours. 

Monica [00:33:24] Merci beaucoup. Ben je trouve que justement, cette idée de partage, c'est le mot clé pour notre conversation. Et j'invite tout le monde à continuer à partager. J'espère que justement, ce que tu as à nous dire sera largement partagé et permettra la construction des espaces alternatifs par plusieurs. Merci beaucoup, Luisa. 

Luisa [00:33:46] Merci à vous. 

Joey [00:33:49] Vous avez aimé cet épisode? Faites-nous part de vos commentaires sur les réseaux sociaux ou par courriel à crefo.oise@utoronto.ca.